Vous n’êtes certainement pas passé à côté de la fameuse annonce d’Emmanuel Macron dans un entretien au Parisien mise en ligne le mardi 4 janvier. Si la polémique s’est essentiellement centrée sur cette déclaration faite par le président : “les non vaccinés, j’ai très envier de les emmerder”, aujourd’hui nous allons davantage nous pencher sur celle-ci :
“Quand ma liberté vient menacer celle des autres, je deviens un irresponsable. Un irresponsable n’est plus un citoyen”
Le Parisien
Si l’opposition reproche à Emmanuel Macron d’instaurer une “déchéance de citoyenneté” la définition philosophique de la citoyenneté qui nous vient d’Aristote semble pourtant lui donner raison.
La citoyenneté est le statut juridique qui permet à un individu de devenir citoyen. Elle donne donc accès à l’ensemble des droits politiques, tout en créant des devoirs, permettant de participer à la vie civique d’une société ou d’une communauté politique, par opposition au fait d’être simple résident. En effet, pour Aristote, être citoyen c’est participer pleinement à la vie de la cité, ça n’est donc pas simplement appartenir à un pays ou à une nation mais bien y être actif. Or dans la mesure où il agit, le citoyen est alors responsable des conséquences de ses actes. Il semble donc difficile de séparer la notion de citoyenneté de celle des responsabilité.
Emmanuel Macron a également insisté sur la notion de devoir, qui est aussi une composante de la citoyenneté, lors de son discours du 31 décembre en énonçant : “Les devoirs valent avant les droits”
Pour le philosophe contemporain Pierre-Henri Tavoillot il est cependant compliqué de penser indépendamment les devoirs et les droits. Les uns ne peuvent aller sans les autres. La volonté du président était certainement ici de ré insister sur le caractère essentiel de l’accomplissement de devoirs par les citoyens, souvent minimisé pour des raisons historiques et culturelles. En effet, la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen est d’abord une déclaration des droits même s’il y avait eu en 1789 un grand débat pour savoir s’il fallait corréler celle-ci à une déclaration des devoirs. La réponse qui avait été faite à l’époque est que les devoirs qu’impliquaient les droits étaient une évidence. Cela s’explique par un contexte où régnait l’absolutisme monarchique, niant toute liberté et rendant une reconnaissance des droits bien plus importante qu’une reconnaissance des devoirs. Mais aujourd’hui dans un contexte plus respectueux des libertés de chacun, on peut légitimement se demander si ré insister sur les devoirs des citoyens n’est pas indispensable.
L’accomplissement des devoirs ne doit pas être vu comme une forme de diminution de nos libertés mais bien comme une forme de respect de la liberté d’autrui. Il s’agit certes d’une forme d’obéissance mais non de soumission, or comme le dit Rousseau : “un peuple libre obéit mais ne sert pas ; il a des chefs et non pas de maître”.
Par Romane Campos